Читать книгу La Fauvette. Les souvenirs de littérature contemporaine онлайн
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–Oh oui! dit Léonie, prenons souvent des costumes étrangers, allons aux bals travestis... Il est pénible d’être toujours soi, d’avoir toujours le même nom, la même vie, les mêmes désirs; transportons-nous parfois dans une autre existence: soyons, pour une nuit, dame châtelaine, fraîche Suissesse ou pauvre Tyrolienne, avec d’autres intérêts, d’autres espérances, d’autres amours.»
Valter, après avoir répondu d’une manière flatteuse à la personne qui venait de s’exprimer ainsi, s’inclina et laissa ces dames livrées à leur sérieux entretien.
Quand Léonie fut de retour chez elle, elle s’enferma dans son parloir, jeta à la hâte le voile, le châle, les fourrures, qui l’oppressaient, appuya sa tète dans ses mains, et tomba dans une profonde méditation.
Était-ce le choix d’un costume qui l’absorbait a ce point?... Elle portait quelquefois la main à son front, comme pour étreindre une pensée brûlante qui la possédait, d’autres fois à son cœur, comme si ses élans fussent venus l’enlever à elle-même; cependant, c’était sa toilette du lendemain qui l’agitait ainsi; elle venait de décider qu’elle prendrait un costume de femme orientale. Oh! c’est que ce turban qu’elle allait ceindre était décisif dans sa destinée! Prendre le costume de la femme que Valter avait désignée dans ses préférences, c’était lui dire qu’on acceptait son amour, c’était l’aveu qu’il sollicitait depuis longtemps, et qu’elle avait toujours refusé, elle, femme respectueusement attachée à son mari et à ses devoirs... C’est que, en sentant tout le danger de cet aveu, elle s’y décidait avec remords, car c’était sa première faute, mais avec un entraînement irrésistible, car c’était son premier bonheur.