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Plus souple que Courbet, beau praticien héritier des techniques traditionnelles, plus hardi et plus peintre que Millet, il a, comme ce dernier et avec plus d’audace, cherché un style nouveau pour traduire la vie et la sensibilité contemporaines.

Ce sont ces efforts précisément qui le classent. Plus encore que les pages accomplies auxquelles l’admiration va d’abord, les morceaux inachevés, tumultueux, imparfaits, sont révélateurs de sa mission. Par un métier très synthétique, élimiminant la particularité, le détail des lignes et des formes, construisant, charpentant, par masses solides, des ensembles que les couleurs, que la lumière venaient inonder de vie, il a recherché l’expression épique et rapide du fait, perpétuellement renouvelé, banal et rare, qui s’accomplit chaque jour auprès de nous.

Ses contemporains ne l’ont pas compris et, remarquez-le bien, ils ne pouvaient le faire. Eux, que déconcertait le métier de Corot et qui trouvaient rudimentaires les œuvres de Millet, pouvaient-ils voir dans les toiles de Daumier autre chose que des ébauches informes. Selon une observation de M. Klossowsky, pareille aventure est arrivée à Delacroix et à Daumier: il a fallu l’éclosion des impressionnistes pour que pleine justice fût rendue au génie de Delacroix; pour comprendre Daumier peintre, il a été nécessaire que nous nous intéressions à Manet, à Degas, à Toulouse-Lautrec, à Van Gogh. L’inspiration démocratique de Carrière, de Constantin Meunier, de Steinlen, nous permet aujourd’hui de mesurer la grandeur de celui qui fut de leur famille, avant eux.

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